Brun Braveterre
Messages : 1881 Date d'inscription : 17/06/2011 Age : 35
Feuille de personnage Fonction: Duc de Béarns Âge: 51 ans DC: Vainqueur Loinvoyant
| Sujet: Et il vécurent heureux ? Sam 20 Oct - 11:17 | |
| A l'occasion des vingt ans du règne de Vainqueur Loinvoyant, de grandes célébrations avaient lieu à Castelcerf. Toutes les familles Ducales avaient été invitées ; le Clan d'Art avait été réuni en prévision du nouveau Appel qui suivrait les festivités. La capitale, dont la Cour rayonnait depuis que la Reine avait assis son influence, fourmillait d'activité. Plus une chambre n'était inoccupée. Les domestiques et les cuisiniers ne savaient plus où donner de la tête, alors que le banquet d'ouverture débutait dans la cour du château, pleine à craquer de notables assis en grandes tablées, et de petites gens qui se servaient au généreux buffet. Vainqueur n'oubliait jamais son peuple, et Vainqueur n'était pas doué pour les discours sophistiqués, comme il le montra une nouvelle fois. La voix forte et l'Art rayonnant, le monarque commença par rendre hommage à sa mère qui s'était éteinte au début de l'année, et ne fêterait pas ce vingtième anniversaire à ses côtés ; puis à la nouvelle Reine qui siégeait à ses côtés, ravissante, pour laquelle il eut des compliments maladroits que Shyrin sembla accueillir avec modestie et indulgence.
Comme il semblait loin le temps où l'on avait dressé dans la Cour un bûcher funéraire, et que la Chalcédienne avait été molestée ! Aujourd'hui s'était rétablie une ère de paix et de prospérité à la faveur du commerce avec les Etats Chalcèdes, incarnés par la présence d'Hobes Cardia. Même les Vifiers s'étaient rangés. Il n'y avait guère que les Pirates pour troubler la digestion de ces dames et empêcher l'embonpoint de ces messieurs. Vainqueur se garda bien de les mentionner, terminant sa rapide allocution en remerciant ses Ducs et l'ensemble de ses sujets d'être là, et en leur souhaitant bon appétit. Puis le Roi se rassit, consulta sa femme du regard, sembla encore plus content de lui et lança un regard canaille à Brun, assis en face de lui, tandis qu'il s'emparait de la plus grosse patte de poulet. A côté de son père, dont l'appétit rivalisait avec celui de son mari, et en face d'Acuité, Shyrin resplendissait. Acuité partageait son attention entre les prestigieux invités et son amie, tout en cherchant régulièrement du regard la haute silhouette de Taebryn, sensé surveiller les jumelles. Brun buvait avec insouciance, profitant de la compagnie de son Roi et ami, qu'il avait quitté depuis trois ans, lorsque Glace Loinvoyant avait été assassiné par des Vifiers.
Ces huit dernières années avaient été difficiles pour Brun et Acuité. Cette dernière avait failli succomber à sa grossesse jumelée ; puis, après quelques années de convalescence et d'accalmie, il avait fallu regagner Castellonde à tous les sens du terme. Les époux n'étaient pas d'accord sur la manière d'endiguer la révolte. Plutôt que la sévérité que Brun prônait à la suite de son beau-père, c'était la mansuétude d'Acuité qui avait désamorcé le conflit en Béarns puis en Cerf. A la suite des lois de tolérance et d'amnistie qu'elle avait signé de sa main, et de la paix qui s'en était suivie, la petite Duchesse avait retrouvé toute sa popularité, et nul ne contestait sa légitimité - surtout pas son mari, trop occupé à organiser la défense côtière avec le Vainqueur, lui-même trop heureux de trouver ces fidèles alliés là où Béarns avait toujours été un ennemi masqué. Le Roi était rassuré : la succession de la première branche Loinvoyant était assurée avec Aimée, son aînée, qui alliait la beauté de sa mère avec l'audace de son père, et ses deux fils cadets.
Plus ou moins surveillés par le Béarnais, les enfants formaient une petite société. Espoir et Volonté retrouvaient Aimée après cette longue séparation, à l'échelle de leurs courtes existences. Ces premiers n'avaient d'autre point commun que leurs cheveux bruns. Espoir était calme et réservé, mature pour son âge ; déjà les boucles de l'enfance disparaissaient, à moins que ce ne soient ces yeux noirs si sérieux ? Son père aurait voulu qu'il siège à ses côtés, mais sa mère l'avait autorisé à jouer avec Volonté, son âme damnée : effrontée, la petite métisse ne faisait que ce qui lui plaisait ; leurs responsabilités n'étaient bien sûr pas les mêmes, considérant leur différence de rang. Plus jeune, la royale rouquine s'imposait néanmoins comme le leader naturel. Même Vérité Lunabille, grand de taille comme de gueule, fermait son clapet en sa présence, la regardant peut-être avec un peu trop d'intérêt. Flanquées de leurs dogues que leur père les avait autorisées à emmener, comme il autorisait tout le reste, Victoire et Liberté, les jumelles béarnaises, testaient des yeux bleus de leur défunt grand-père la vaillance des deux fils du Roi : sauraient-ils les accompagner dans leurs méfaits ? Tous ignoraient encore que dans quelques années, certains entendraient un étrange Appel, de ceux auxquels on ne peut résister ; de ceux qui vous arrachent à l'enfance et à votre foyer pour vous offrir de nouveaux horizons et une nouvelle famille. Tous ignoraient qu'à la table des Artiseurs, certains les regardaient, certains les attendaient.
Vaillant regardait Vérité d'un air faussement distrait, tout comme il jetait des regards à la table d'honneur où siégeaient ses deux maîtresses : la Duchesse de Bauge, qu'il servait, et la Duchesse de Rippon, qu'il aimait toujours en secret. Pourtant, c'était à la Reine qu'il devait son retour en grâce. Après un conflit violent avec le Roi, l'Artiseur avait été affecté à un lointain poste militaire d'Haurfound où il avait dû se retirer avec son épouse Allégresse et sa fillette Claire. D'allégresse, là-bas il n'y avait plus eu, tant la vie mondaine voire civilisée lui manquait ; sa paternité ne le consolait pas de l'absence définitive de Chiara Lunabille, et il avait fallu la perte d'un fils pour resserrer les liens distendus de sa famille. La Reine, dont Vaillant avait toujours pu se targuer de l'amitié, plaida sa cause et après quelques années d'exil, l'Artiseur entra au service de la Duchesse de Bauge, auprès de laquelle Chiara l'avait introduit. Un retour aux sources dont Vaillant n'avait pas à se plaindre, Allégresse se plaisant dans sa belle-famille, ses enfants légitimes s'épanouissant sous le soleil de Bauge ; lui, jouissant de la Cour sophistiquée du Gué, et des caresses trop rares de Chiara. Ce soir, qui sait, Vaillant pourrait poser sa tête fatiguée sur le sein bien aimé. Demain, qui sait, Vaillant pourrait voir Vérité faire ses premiers pas sur le chemin de la magie qu'à défaut du reste, ils partageaient...
La fête battit son plein jusqu'à la nuit. Les enfants couchés, Taebryn avait pu passer le reste de la soirée avec sa compagne, qui l'avait obligé à danser. Bien que toujours sceptique sur ces danses des Duchés, Iris passait un bon moment avec son époux et amant ; n'était-ce pas dans ce château qu'ils s'étaient rencontrés ? L'alcool et les souvenirs tendres faisaient briller ses yeux en amande. Brun était joyeux lui aussi, un peu trop ; Acuité n'était pas en reste et les époux avaient tiré leur révérence, se faufilant en pouffant jusqu'à leurs anciens appartements, comme les gamins que depuis longtemps, ils n'avaient pas été. Vaillant avait disparu, et la Duchesse de Rippon aussi. Le ventre arrondi, Shane s'était endormie depuis longtemps... Le couple royal, lui, n'avait pas démérité. Jusqu'à l'aube, Shyrin et Vainqueur saluèrent le départ de chaque invité. Une matinée paresseuse, luxe rare, leur était promise avant la suite des festivités. Chasses, joutes, bals et banquets : rien n'avait été négligé. La fête serait belle et longue comme la paix qu'elle promettait. Une occasion unique de montrer leur puissance à leurs alliés et sujets, de renouer les vieilles amitiés, pour aujourd'hui et pour demain. Demain avait déjà commencé ; l'avenir marchait d'un pas victorieux. |
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