La jeune femme respire la douceur et la joie de vivre. Son visage est bien souvent illuminé d’un sourire bienveillant et son regard vert d’eau pétille. Elle arbore une épaisse chevelure d’un noir de jais qu’elle laisse tomber lourdement autour de son visage et sur ses épaules. Sorcière, elle l’est bien, et l’on pourrait croire qu’elle travaille son personnage grâce à des gestes amples, lents et précis : une aura envoûtante flotte autour d’elle et de ses formes généreuses. Car si elle n’est pas plus grande que nécessaire, la jeune femme possède d’autres proportions généreuses. Sa poitrine présente un arrondi alléchant, ses hanches et ses cuisses n’étant pas en reste malheureusement, trahissant le petit penchant de la jeune femme pour les friandises (tout particulièrement le miel). Elle n’en décide pas moins de s’habiller comme toutes les autres femmes des Duchés, quitte à mettre ses formes en avant, et assume (presque) sans complexe sa silhouette trop lourde à son goût.

Mélisse ne s'appelle pas ainsi par hasard. La plante dont elle tient son nom a la réputation de détendre, de faire lâcher prise et cesser de ruminer des idées noires pour profiter mieux de la vie. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle applique parfaitement cet effet sur elle-même.
Mélisse est une jeune femme pleine d’énergie qui croque la vie à pleines dents. Toujours joyeuse, toujours enthousiaste, elle est capable de trouver le bon côté des choses pour tout. Les situations les plus désastreuses n’ont pas de prise sur elle. Mélisse vit les choses sans rien prendre au sérieux, elle vit l’instant présent sans trop penser à l’avenir, elle savoure ce qui lui est donné sans se demander outre mesure ce qui se passera le lendemain. Et cela vaut mieux, car le lendemain elle le connait déjà, c’est bien pour cela qu’elle évite d’y penser.

Arkanja, sa mère, sorcière des haies restée dans les Montagnes où elle continue à exercer pour aider les gens de son village et ceux du village voisin.

Huna, sa petite sœur d’environ dix ans qu’elle ne connait presque pas et qui vit auprès de sa mère.

Vaillant Fructurive, ancien client, ami, amant…

Les clients de sa boutique.

Pour comprendre ce qu’est devenue Mélisse, il faut d’abord comprendre qui est sa mère. Arkanja est une montagnarde. Elle possède la magie des haies qu’elle a transmise à sa fille et vit dans un petit village non loin de la frontière des Quatre-Duchés. Elle jouit là-bas d’une grande popularité. Il faut dire que personne ne peut rivaliser avec elle sur la connaissance des plantes, des remèdes et des maladies aussi bien humaines qu’animales. On vient la voir pour les petits et les gros bobos, pour les accouchements ou pour traiter le bétail contre les parasites. Lorsqu’elle a un peu de temps pour elle, le soir au coin du feu, elle confectionne des amulettes, destinées à protéger les troupeaux, les maisons ou les récoltes. Les femmes viennent aussi la voir pour réussir à concevoir, ou au contraire pour ne plus porter d’enfant. Certains curieux s’intéressent parfois à leur avenir… en résumé, la sorcière est aimée dans son village et dans les alentours. Elle aide de son mieux et ne demande en échange rien d’autre que ce dont elle a besoin pour se nourrir et vivre confortablement.

Ce puits de savoir est aussi terriblement avide d’apprendre tout. C’est ainsi que, il y a de cela plus de trente ans, lorsqu’un homme des Quatre-Duchés passa par son village, elle l’assaillit aussitôt de son avidité. L’homme ne resta que trois nuits chez elle, néanmoins ce fut suffisant pour qu’elle arrache de sa mémoire tout ce qui pouvait la faire rêver. Et obtenir un enfant de lui.

C’est aussi simplement que Mélisse fut conçue. Petite bâtarde issue de deux nations, elle hérita de cet aspect dans son nom. Selon la coutume des Duchés, elle reçue le nom d’une plante dont sa guérisseuse de mère désirait lui transmettre les caractéristiques.

Ainsi donc, la petite montagnarde vécue dans les souvenirs laissés par ce père qu’elle ne verrait jamais à sa mère qui lui apprenait tout ce qu’elle savait. Avec le temps, Mélisse devint comme sa mère : pleine de connaissances et avide d’en assimiler de nouvelles. Elle était également curieuse de découvrir les Quatre-Duchés dont elle avait hérité une partie de son sang. Voilà pourquoi, dans sa vingtième année, elle prit son baluchon et s’en alla sur les routes découvrir ce pays pas si lointain et terriblement attirant. Le village était trop petit pour deux guérisseuses, de toute façon, et il était temps que Mélisse parte sur sa propre route.

La jeune femme voyagea sans but durant trois ans. Elle vadrouilla dans les campagnes et les villes des Quatre-Duchés sans se poser bien longtemps. Elle utilisait son savoir pour gagner son pain ou le récolter elle-même dans la nature. Là-bas, on ne voyait pas sa magie avec la même bonté que dans son pays natale. Cela n'empêcha pas la jeune fille d'utiliser ses talents malgré tout. Elle aida les gens comme elle avait toujours vu faire sa mère. Elle apprit même de nouvelles choses sur sa magie. Et elle tomba surtout irrémédiablement amoureuse de ce pays. Voilà pourquoi, lorsqu’elle rentra au bout de ces trois années, elle avait la ferme intention de retourner faire sa vie là-bas. Mais avant cela, elle désirait faire ses adieux à sa mère.

En rentrant, Mélisse eut la surprise et le plaisir de voir qu’elle n’était désormais plus la seule dans le cœur de sa mère. Huna était née durant son absence, d’une union similaire à celle qui avait produit sa sœur ainée, et profiterait sans aucun doute du même enseignement. Lorsque Mélisse repartie quelques temps plus tard, ce fut le cœur léger et heureuse.

Il fallut quelques années de plus pour que la jeune femme atteigne Bourg-de-Castelcerf, y trouve une boutique disponible et monte sa propre affaire. Elle y vend ses remèdes, amulettes et sorts ainsi que tout le panel de ses services. Ce ne fut pas facile de vaincre les réticences, et il existe encore beaucoup de sceptiques. Aujourd’hui cependant, la sorcière a obtenu une notoriété confortable qui lui permet de vivre dans la simplicité qu’elle affectionne.